Fenrir

Voila quelques mois que Fenrir avait découvert le plaisir de la vitesse et la force de l'adrénaline et voila quelques mois qu'elle finissait régulièrement couverte d'huile en tentant de reproduire le moteur trafiqué de cette voiture.

Voila quelques semaines que la mécano' avait trouvé la vis en Algae. Voila quelques semaines que sa concentration avait chuté, voilà quelques semaines qu'elle finissait à l'infirmerie pour des bourdes relativement idiotes.

Mais là tout changeait ! Un nouvel espoir était arrivé ! La cité des Sept ! La légendaire cité pirate ! La ville aux mille noms ! Le début d'une nouvelle aventure et une soudaine envie de faire du tourisme. Et voilà quelques minutes que Fenrir observait les quais, un léger sourire aux lèvres. Elle ne savait plus vraiment ce qu'elle voulait ou devait ressentir.

Laissant le vent faire flotter ses cheveux, elle étala d'un geste de la main une tâche d'huile sur sa joue. Pour la première fois depuis quelques temps, l'excitation reprenait sa place. Une nouvelle aventure. Le moyen de penser à autre chose.

La ville mythique qui s'étalait sous ses yeux lui mettait du baume au cœur. D'un geste, pour une fois souple, elle sauta par dessus le bastingage. Et lorsque ses pieds nus entrèrent en contact avec les dalles sales du port, son sourire s’agrandit. Oui, l'excitation s'étalait sur cette couche de doute et de peur qu'elle accumulait et que la fierté n'arrivait pas à complètement dissimuler.

Elle choisit de mettre de côté toutes ces questions sans réponses et parti déambuler entre les quartiers de cette ville si spéciale. Bien vite, c'est dans le quartier des inventeurs qu'elle arriva. La mécanicienne s'y sentait comme dans une énorme salle des machines, c'était bruyant, relativement sale, en bazar et complètement artificiel.

Le nez en l'air, Fenrir prenait conscience de sa petitesse, elle qui était fière de ses patins volants, elle avait au dessus d'elle un homme sur patins propulsés,  une dame sur un vélo à hélices... Oui, ses petites inventions ne valaient rien par rapport à ce qui défilaient sous ses yeux. Bouche bée, la mécano' ne ressentait plus que de la curiosité, elle voulait tout savoir, tout connaître, pourvoir tout tester et tout refaire !

C'est sans réel but qu'elle fini devant une imposante statue. Là, un homme bedonnant tout en cuivre lui souriait. Un sourire franc et engageant. A ses pieds, une montagne d’ustensiles rouillés, endommagés ou en parfait état traînaient. Fenrir leva un sourcil, curieuse, et s'accroupit devant le tas informe. Soudain, une clé de douze s'envola par dessus sa tête et atterri dans une grand bruit de ferraille. La mécano sursauta légèrement et leva la tête vers l'inconnu qui se trouvait debout derrière elle.

Grand, fin, à la moustache complètement excentrique, un homme la regardait avec un petit air désabusé. Une partie de sa tignasse crépue avait apparemment prit feu et fumait encore. Sèchement, il dit :

-J'y crois pas, mais ça reste une offrande, je réussirai un jour à créer cette baignoire réfrigérante ! Et à ce moment là, je pourrais récupérer ma précieuse clé !

Et il partit sans dire autre chose. Fenrir le suivit des yeux, complètement éberluée, puis reporta son regard sur la statue et son amoncellement de métal.

Son projet d'en ce moment avançait au ralentit mais elle ne désespérait pas de trouver un jour le moyen d'offrir à L'Elian le plaisir de la vitesse ! Aussi, une offrande, même si elle n'y croyait pas le moins du monde, pouvait être une idée intéressante. Elle se leva donc, et fouilla dans les poches de sa ceinture. Machinalement, elle en sortit sa vis en Algae et son visage s'assombrit. Elle serra alors le poing sur le petit objet et le leva au dessus de sa tête dans le but de le lancer et de la voir disparaître au milieux de tout ce bazar.

C'est au dernier moment qu'elle se ravisa. Elle avait besoin de réponses et c'était le seul indice qu'elle avait en sa possession. Elle rangea soigneusement la vis et trouva quatorze petits boulons à la place. Elle eut un petit sourire et les lança. Est ce qu'un jour elle viendra les récupérer ? Sûrement pas. Mais ça ne voulait en aucun cas dire qu'elle échouerait dans cette mission qu'elle c'était confiée et c'est avec ou sans l'aide d'un dieu auquel elle ne croyait pas qu'elle y arrivera.